Santé/Burkina : Le Lupus, une « tueuse silencieuse » peu connue

Le Réseau des médias africains pour la promotion de la santé et l’environnement / Burkina Faso (REMAPSEN/BF) a organisé ce 16 mai 2024, au Centre hospitalier universitaire de Bogodogo, un panel sur le lupus. Une maladie peu connue qualifiée de tueuse silencieuse par les spécialistes. Le réseau a invité la Société burkinabè de rhumatologie (SBR) pour en savoir davantage sur cette maladie.

Le lupus. Certains n’en ont jamais entendu parler. Pourtant, c’est une maladie qui existe au Burkina. Deux membres de la Société burkinabè de rhumatologie, Dr Enselme Zongo et Aboubakar Ouédraogo ont donné plus de précisions sur la maladie.

Le Lupus, expliquent-ils, est une défaillance du système immunitaire de l’être humain qui se ressent généralement sur la peau, les reins, le cœur ou encore le système nerveux. Ses manifestations sont généralement des douleurs articulaires, cardio-vasculaires, cérébrales, rénales, cutanées, la fatigue, etc. « La maladie du Lupus est peu connue dans nos sociétés à cause de la confusion de ses symptômes d’avec certaines maladies comme le VIH/SIDA, le paludisme et la tuberculose », a justifié Dr Aboubakar Ouédraogo. Ce rhumatologue du Centre hospitalier universitaire de Bogodogo a laissé entendre que cette maladie est une « tueuse silencieuse » qui se manifeste beaucoup plus chez les femmes.

Elle touche plus les femmes que les hommes

« Le lupus touche 9 femmes pour un homme. C’est en gros une grande prédominance chez les sujets de sexe féminin». Son collègue, Dr Enselme Zongo, a ajouté que le plus souvent, sur dix (10) cas diagnostiqués, neuf (9) sont des femmes. « Le véritable problème est que jusque-là, l’on ignore l’élément déclencheur de cette maladie. Chez la femme, l’âge de déclenchement de la maladie est entre 15 et 35 allant même à 40 ans souvent. Ce n’est pas une maladie héréditaire », a-t-il détaillé.

Pour éviter des complications, les rhumatologues exhortent les femmes malades du lupus à atteindre une certaine stabilité de la maladie avant de prendre une grossesse. « La grossesse présente un gros risque pour la maman autant que pour le bébé, c’est pourquoi nous recommandons le plus souvent la contraception d’autant plus que la grossesse elle-même est hormonale toute comme le lupus », a justifié Dr Zongo qui précise cependant que le lupus lui-même ne diminue pas la fertilité. Une femme lupique peut donc faire des enfants.

Une centaine de personnes prises en charge au CHU de Bogodogo

Au Burkina Faso, cette maladie est bien présente même s’il est difficile de donner un état de lieux clair à son sujet. A ce jour, c’est une centaine de patients que suit le service de rhumatologie du CHU Bogodogo, a indiqué Dr Kaboré, l’un des anciens du service. Bien des personnes ont la maladie du lupus sans le savoir, à en croire les rhumatologues. C’est seulement dans les années 2006 que le Burkina a eu ses premiers spécialistes dans ce domaine. Du fait de la similitude de ses symptômes avec ceux des maladies telles que le VIH/SIDA, le paludisme, la tuberculose ou encore l’anémie, c’est après plusieurs examens infructueux que les malades se voient orientés vers le service de rhumatologie. Jusque-là, les études scientifiques n’ont pas encore permis de déceler la cause du lupus. « Il y a plusieurs facteurs. C’est une maladie multifactorielle. Parmi ces facteurs, on a les hormones, ce qui justifie le fait que le lupus frappe plus les femmes vu qu’elles ont plus d’hormones que les hommes. Il y a le facteur environnemental lié aux infections, à la cigarette, au stress… ». Les chocs psychologiques et émotionnels comme la séparation ou la perte d’un proche, facilitent le déclenchement du lupus lorsque le système était déjà défaillant.

Des victimes de cette maladie présentes au panel ont confirmé les manifestations citées par les médecins. Selon leurs explications, les douleurs sont quotidiennes et de divers ordres : douleurs articulaires, raideurs, douleurs cutanées… « L’une des manifestations de cette maladie est de la fatigue, on a toujours besoin de repos, chose qui n’est pas évidente dans nos sociétés où il faut toujours se battre pour se nourrir. Et donc c’est un combat », témoigne Agnès Marie Odile Kiba, présidente de l’association Lupus Burkina.

Une maladie incurable, avec un coût de prise en charge élevé

La maladie du lupus, c’est aussi son caractère incurable. Et les coûts liés au diagnostic et aux produits pour se maintenir sont énormes. « Le coût moyen du traitement est de 50 000 FCFA/mois, sans oublier le diagnostic qui coûte 100 000 FCFA », selon Agnès Kiba. Les rhumatologues précisent qu’il s’agit là du coût moyen mensuel car, en fonction de la gravité du mal, la prise en charge peut aller jusqu’à 5 000 000 FCFA/an. Heureusement, rassurent-ils, des cas graves, ils en rencontrent très rarement au Burkina.

L’association Lupus Burkina lance alors un cri de cœur à l’intention des décideurs politiques en vue d’une prise en compte de la situation des patients lupiques dans les prises de décisions en matière de santé.  Stéphane Simporé, un patient lupique, interpelle le gouvernement : « Aux autorités gouvernementales et à nos dirigeants, je lance ce cri de cœur afin qu’ils puissent nous entendre et mettre l’accent sur les questions de diagnostic. Rendre le système de santé, surtout les soins et la prise en charge accessibles par tous ».

A l’état actuel, il n’est pas démontré que le lupus est une maladie contagieuse ou héréditaire, les rhumatologues exhortent les populations à être prudentes et à faire des examens le plus tôt possible en cas de doute.

Par Judichaël KAMBIRE, Sira info

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