Forêts classées du Burkina : Le « poumon vert » en péril face à des décennies de laxisme politique

Au centre, à l’est, à l’ouest, au nord comme au sud, le principal poumon vert du Burkina, à savoir les forêts, est atteint. Elles n’ont pas subi la furie des violents feux au cœur de l’Amazonie , mais elles sont acculées, défrichées, assiégées, etc. Des hectares de forêts, même classées, sont transformés en champs, en pâturage, en sites d’orpaillage, en villages avec des investissements étatiques comme des écoles, des forages, des centres de santé, etc. Conséquence : les forêts disparaissent année après année, sous le regard impuissant des agents des Eaux et Forêts, en manque d’effectif, de moyens financiers et matériels, doublé d’un laxisme des gouvernements successifs.

Mars, avril et mai 2024. Les urgences médicales sont en alerte, à Ouagadougou notamment. Des vagues de chaleur, jugées extrêmes, touchent le pays. Dans une interview accordée au média en ligne burkinabè LeFaso.net, le médecin anesthésiste-réanimateur au Centre hospitalier universitaire Yalgado Ouédraogo à Ouagadougou, Dr Abdramane Ouattara, fait des révélations alarmantes, le 16 avril 2024 : « Nous recevons autour de 35 patients par jour (…) Par jour en moyenne nous recevons quatre personnes arrivant déjà décédées. Il y a certains aussi, autour de deux personnes par jour, qui arrivent et qui décèdent quelques minutes après. La mortalité liée au coup de chaleur est très élevée en cette période. Elle tourne autour de 25% à 30% ». Il n’y a pas de statistiques officielles auxquelles nous avons eu accès et qui font le point des décès liés à cette vague de chaleur. Mais les révélations du Dr Ouattara donnent un aperçu de son ampleur.

Selon un rapport de World Weather Attribution (WWA), les vagues de chaleur observées entre mars et avril 2024 au Burkina « auraient été impossibles à se produire sans le réchauffement climatique ». Cette conclusion est renforcée par une autre étude du Projet Alerte aux canicules au Sahel et à leurs impacts sur la santé (ACASIS) publiée en 2018. Elle évoque une augmentation des températures au cours des 50 dernières années au Burkina Faso et particulièrement à Ouagadougou. Elle fait un lien entre le phénomène de la chaleur, de la morbidité et des conditions « climatiques extrêmes ».

Mais cette forte chaleur n’est pas un fait du hasard. Un rempart naturel contre ce phénomène semble fortement atteint au Burkina : LES FORÊTS. Elles permettent en effet d’éviter et de réduire les émissions de gaz à effet de serre et empêchent la planète de se réchauffer à des températures plus extrêmes, selon le Programme de l’ONU pour l’environnement. Or le fait est là ! Au Burkina Faso, les forêts de façon générale sont à la croisée des chemins. Elles disparaissent, année après année, de façon massive. Et ce n’est pas une logorrhée.

6,18 millions d’hectares perdus entre 1992 et 2014

Des études d’institutions internationales et de structures étatiques ont sonné l’alerte. La Banque mondiale a mis les « pieds dans le plat » depuis 2022 dans un document dénommé « Note sectorielle sur les forêts. Pour une gestion durable des forêts du Burkina Faso ». Ce document révèle que le pays a perdu 47,5 % de ses forêts entre 1992 et 2014. En 1992, en effet, les terres boisées, selon l’institution internationale, étaient évaluées à 14 841 672 hectares. Mais cette superficie est passée à 8 651 859 hectares en 2014. Donc 6,18 millions d’hectares perdus en 22 ans. Les forêts représentaient 31,6% de la superficie du pays en 2014. Ces mêmes données estiment à une moyenne de 281 355 hectares, la superficie des forêts perdues par an.

Cette disparition de forêts concerne aussi celles classées dont la superficie est évaluée par le ministère de l’Environnement à 3,9 millions d’hectares. 

 L’Etat lui-même fait partie du problème

Quelles peuvent être les raisons de ce phénomène ? Nous avons frappé à la porte du ministère de l’Environnement. Et c’est le directeur des forêts, le Colonel Bertrand Tapsoba, qui nous reçoit, le 22 mai 2024. « Nous perdons actuellement environ 83 000 hectares par an. Cela est dû au déboisement, à l’agriculture du fait que notre système agricole est extensif, à l’orpaillage anarchique », explique-t-il d’emblée. Ce ne sont pas les seules raisons. Un autre phénomène gangrène le secteur forestier. Il y a aussi la coupe abusive du bois, la cueillette « sauvage » des fruits non mûrs, la situation de certains déplacés internes qui, après leur déplacement, sont obligés de défricher de nouveaux champs, cite le directeur des forêts. « Il y a l’occupation anarchique des forêts. Nos forêts classées sont annexées. Vous avez par exemple des habitats à l’intérieur. Il y a également la divagation des animaux et le surpâturage », mentionne-t-il.

Le directeur des forêts, le Colonel Bertrand Tapsoba

Il ne cache pas son inquiétude sur la situation. « Ce que nous reboisons ou récupérons ne dépasse pas un dixième de ce que nous perdons chaque année. Nous sommes conscients qu’il faut qu’on travaille à renverser la tendance de cette dégradation. Cette année, l’impact de ces changements évoquées par  climatiques sur les populations a été ressenti », martèle-t-il. Mais comment se fait-il que des populations aient pu s’installer dans les forêts classées ? Pour lui, c’est un sujet sensible et complexe. « Le problème est très complexe. Souvent, c’est l’Etat lui-même qui réalise des investissements, notamment des forages, des écoles dans lesdites forêts pour les populations qui y sont installées illégalement. Ce qui nous rend la tâche difficile ». Il cite en exemple le cas de la forêt de Kua dans la région des Hauts-Bassins. L’Etat a voulu y construire un hôpital alors que la forêt n’est pas déclassée. Ce projet avait provoqué une grande polémique qui a fini par faire reculer le gouvernement du Président Roch Marc Christian Kaboré. L’hôpital n’a finalement pas été construit dans la forêt classée.

Sur cette question d’occupation des forêts classées, les propos du  directeur des Forêts se confirment. Nous avons retrouvé un document dénommé “Situation des forêts classées du Burkina et plan de réhabilitation” du ministère chargé de l’Environnement qui en parle. Il dresse la liste des forêts et les pressions que chacune subit. Il date de 2007. Mais les études qui évoquent la disparition des forêts couvrent l’année 2007. Ces données sont-elles toujours d’actualité ? Le directeur des Forêts et d’autres agents du ministère de l’Environnement interrogés ont confirmé son authenticité en indiquant que la dégradation a par contre probablement évolué. Le Burkina compte 77 aires classées dont 65 forêts classées. Mais elles subissent des pressions anthropiques qui sont l’une des causes de leur disparition.

Premier cas : la forêt de Koulbi, dans la région du Sud-Ouest. Elle a été déclarée forêt classée par un arrêté colonial comme pratiquement toutes les autres forêts classées du pays. Exactement le 4 août 1955. Sa superficie est estimée à 40 000 hectares. Mais elle est fortement exploitée dans la production agricole. Pire, des « villages » entiers s’y sont installés. Elle est effectivement assiégée par 12 hameaux de cultures, 3 forages, une école reconnue par l’Etat comme dans les autres cas, une église, une mosquée, 7 moulins et 2 marchés depuis 2007, selon les données du ministère. Et le rapport 2019 du Secrétariat permanent pour la Réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation des forêts dans les pays en développement (REED+) indique également que 40% de cette forêt de 40 000 hectares est dégradée.

Des toilettes modernes de l’école primaire publique de Pathé, un hameau de culture installé dans la forêt de Wayen (Plateau Central)

Deuxième cas toujours dans le Sud-Ouest. La forêt classée de Bontioli, dont l’arrêté de classification date du 23 mars 1957, d’une superficie estimée à 29 500 hectares est également annexée par les populations. Le rapport évoque 13 hameaux de cultures (de petits villages), 4 forages et 2 écoles. Le Secrétaire général du Syndicat national des Agents des Eaux et Forêts (SYNAFOR), Bassirou Ouédraogo, que nous nous avons rencontré, connaît bien le cas de cette forêt: « Il fut un temps où dans cette forêt il y avait des habitations, des forages, des écoles. Cela veut dire que les gens ont eu non seulement le temps de s’installer, de créer des champs, mais l’Etat lui-même paradoxalement vient réaliser des infrastructures sociales pour les accompagner. Cela conforte les populations qu’en réalité elles sont dans leur droit ».  Selon lui, un projet avait permis de réinstaller progressivement les occupants de la forêt dans des villages riverains à l’époque du ministre Laurent Sedego (2004-2008). Mais à la fin du projet, les populations ont manqué de mesures d’accompagnement et sont revenues s’y installer. Cette forêt, selon les données de 2019 du Secrétariat permanent pour la Réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation des forêts dans les pays en développement, est dégradée à plus de 50%.

Ce phénomène n’est pas seulement un fait de la région du Sud-Ouest. Alors direction la région des Cascades. Précisément dans la forêt classée de Dida, d’une superficie estimée à 75 000 hectares. Son arrêté de classification date du 4 août 1955. Exploitation agricole, pacage du bétail, coupe du bois vert, braconnage, comme dans les précédentes, tout y est pratiquement au rouge. Elle abrite aussi 3 forages, une école, un marché. En 2012, il y a eu des tentatives de déguerpissement des populations qui y habitent.  Le journal burkinabè Le Pays avait couvert une manifestation des habitants en colère contre la décision de leur déguerpissement. Le gouvernement, à travers le Gouverneur des Cascades, leur avait intimé l’ordre, en février 2012, de quitter la forêt dans un délai d’un mois. Les habitants en colère avaient affirmé à l’époque qu’ils étaient environ 200 000 dans cette forêt. Face au gouverneur, le porte-parole des manifestants avait martelé : « Nous sommes ici à Banfora parce que tout Burkinabè que nous sommes, l’Etat nous a reniés. Il nous demande de quitter les terres que nous exploitons parce que c’est une forêt classée sans pour autant nous montrer une zone où nous pourrons nous installer ». Le gouverneur leur avait répondu que leur déguerpissement était obligatoire. Mais jusqu’à présent, selon nos informations, la forêt est toujours occupée par les populations.

Des activités économiques en pleine forêt classée (Wayen)

« Dida a fait couler beaucoup d’encres. Le déguerpissement des populations qui y sont installées a été   planifié, budgétisé, toutes les unités ont été mobilisées et en fin de compte, l’opération a été annulée. Il y a eu beaucoup de tentatives qui sont restées sans suite. On peut dire que l’occupation de cette forêt est favorisée par des acteurs politiques parce que l’Etat lui-même y réalise des infrastructures au profit de ces populations illégalement installées comme ailleurs », explique le SG du SYNAFOR, Bassirou Ouédraogo.

Les agents des eaux et forêts se voient impuissants face à cette situation. Et jusqu’à aujourd’hui, plus rien n’y a été entrepris. Les attaques terroristes dans la zone avaient fait partir un bon nombre des occupants, selon nos informations. Mais certains tentent d’y retourner ces derniers mois. Pour des questions de sécurité également, nous ne nous sommes pas rendus dans cette forêt. Mais des recherches de géolocalisation permettent de noter des noms de villages installés sur le périmètre de la forêt. Au moins trois villages et un CSPS.

7 hameaux de cultures, des forages, une école, des lieux de culte, des champs…  dans la forêt classée de Wayen

Sur la liste des forêts annexées, se trouve en bonne place, celle de Wayen dans la région du Plateau Central, d’une superficie estimée à 12 000 hectares et classée par un arrêté colonial du 26 août 1941. Cette forêt abrite, selon les données de 2007, 6 hameaux de cultures (petits villages), un forage, 2 églises, une mosquée, un marché, avec une forte exploitation agricole, un fort pacage du bétail et une forte coupe du bois vert. Son voisin, la forêt classée de Ziga subit la même situation : 3 hameaux de cultures. Le 3 août 2023, le ministre de l’Environnement, Roger Barro, a fait une communication orale en Conseil des ministres sur la question. Les données sur l’occupation de ces deux forêts ne se sont pas améliorées. Un marché avec des installations modernes dans cette forêt classée : https://www.youtube.com/shorts/E8MwCiMMni0

Elles ont empiré. Au lieu de 6 hameaux de cultures à Wayen, c’est désormais 7. Le reste est sans changement. Le ministre a juste informé le Conseil des ministres que des « rencontres d’information et de sensibilisation ont été organisées dans le cadre du processus d’apurement de ces deux forêts classées ».

Tente en béton et tollé, des tables-bancs d’une école primaire publique de la forêt classée de Wayen

Mais bien avant, le 5 juillet 2023, un communiqué du Gouverneur de la région du Plateau Central, rendu public par la Direction générale des Eaux et Forêts, intimait l’ordre aux populations installées dans les forêts de Wayen et de Ziga de déguerpir. Elles avaient jusqu’au 31 juillet 2023 pour partir. Cette menace n’est pas suivie d’action puisque finalement, le gouvernement évoque la poursuite de la sensibilisation. Des champs à perte de vue dans cette forêt classée : https://www.youtube.com/shorts/oBPlnnrV7Ic

Nous avons réussi à visiter cette forêt et constaté tout l’écosystème qui s’y développe : des champs et encore des champs, des troupeaux de bœufs, de moutons, des habitations. De vraies habitations modernes, une école, un marché, des lieux de culte, etc. Et tout cela face à l’impuissance de deux agents des Eaux et Forêts, nos guides d’un jour.

Un manque d’intérêt politique pour les forêts ?

Sur la situation des forêts classées, un fait se dégage. Pratiquement tous les arrêtés de classification des 77 aires et forêts classées du Burkina datent de l’époque coloniale. Ce que nous appelons forêts classées n’auraient peut-être jamais existé si rien n’avait été entrepris à cette époque. Après les indépendances, les différents gouvernements qui se sont succédé jusqu’à présent n’ont pas trouvé nécessaire de classer d’autres forêts pour les protéger des assauts de l’accaparement des terres. Au contraire, celles qui existent sont assiégées. La première classification date du 5 avril 1934. Et concerne la forêt de Yendéré dans la région des Cascades.

Des constructions modernes dans la forêt classée sous le regard impuissant des agents chargés de sa protection

Il y a eu par contre le Parc National Kaboré Tambi, créé en 1936, mais dont la classification officielle date du 2 septembre 1976. Il y a aussi le Ranch de gibier de Nazinga créé en 1979 par des expatriés et nationalisé par l’Etat. Son décret de classification date du 17 mars 2000. Enfin, il y a les réserves de Madjoari et de Pama dans la région de l’Est et la Réserve sylvo-pastorale et partielle de faune du Sahel dont l’ordonnance de classification date du 9 décembre 1970. « Il n’y a pas eu de vision politique sur la question des forêts. Si vous prenez la commune de Ouagadougou, il n’y a pas de forêt en dehors du Parc Bangreweogo, qui fait d’ailleurs partie de la forêt classée du barrage de Bangreweogo. Nos locaux, (un service du ministère de l’environnement), l’université de Ouagadougou (actuelle Université Joseph KI-ZERBO) sont dans la forêt classée du barrage de Ouagadougou. », explique  le secrétaire général du SYNAFOR, Bassirou Ouédraogo. Et ce n’est pas tout !

Parfois le budget annuel du ministère de l’Environnement n’atteint pas 1% du budget national

Le manque d’intérêt politique se traduit aussi à travers les allocations budgétaires de l’Etat pour le secteur de l’environnement. La « Note sectorielle sur les forêts » de la Banque mondiale d’octobre 2022 en parle : « Moins de 1 % du budget de l’État est consacré à la gestion des forêts ». En chiffres concrets, le ministère reçoit ces dernières années, entre 20 et 28 milliards FCFA comme budget. En 2019 par exemple, ce ministère avait un budget ajusté de 18,69 milliards FCFA, dont 10,28 milliards pour la prise en charge du personnel, 1,39 milliard FCFA pour l’acquisition des biens et services, 2,74 milliards pour les « transferts courants » et les investissements 4,29 milliards FCFA, selon des données obtenues par la Banque mondiale. Ce qui représentait 0,79% du budget national qui était de 2213,29 milliards FCFA.

En 2020, ce budget ajusté est remonté à 28,42 milliards FCFA. Ce qui représente 1,12% du budget national. En 2023 par exemple, le ministère en charge de l’Environnement, fusionné avec celui de l’Eau et de l’Assainissement, avait un budget de 89,08 milliards FCFA. En 2024, il enregistre une baisse et chute à 87,92 milliards. Soit 2,38% du budget national.  Ce faible niveau de financement et d’investissement crée des « lacunes au niveau de la gouvernance et de l’application de la loi, une gestion inefficace de la ressource », relève l’institution.

Cette analyse de la Banque mondiale est la même que celle du syndicat des agents des Eaux et Forêts. «  Les ressources matérielles sont une faiblesse du secteur. Donc parmi les causes, il y a les faibles politiques publiques en matière d’environnement et en matière forestière de façon spécifique. Les politiques publiques, c’est d’abord en matière de financement du secteur. Le secteur de l’environnement, c’est à peine 1% du budget de l’Etat. On ne surveille pas par exemple une forêt comme on surveille un espace vide. Il y a des moyens qui sont adaptés que nous n’avons pas. En matière de politique, le secteur de l’environnement n’est pas une priorité du fait qu’on ne met pas les moyens qu’il faut, on ne définit pas des actions fortes », regrette le secrétaire général du syndicat. En matière de lois et de textes, le Burkina est bien doté. C’est leur mise en œuvre qui pose problème et traduit un manque de volonté politique.

Une autre faiblesse, le manque de ressources humaines. En 2010, selon les données de la Direction des ressources humaines, tout le personnel du ministère de l’Environnement était estimé à 1 449. En 2019, selon les données de la même Direction, le personnel est passé à 3 146, dont 424 femmes. La Banque mondiale évalue les agents techniques (fonctionnaires) du ministère à 3000 en 2020 dont 75% sont des forestiers et 25% d’écologistes. Le problème de moyens financiers revient sur la table : « La plupart des agents techniques (environ 2 300 personnes) sont postés dans les régions, mais ne possèdent pas les fonds nécessaires pour accomplir leur mission sur le terrain. De plus, le nombre d’agents techniques affectés dans les régions est inférieur aux besoins estimés dans le plan quinquennal de recrutement du ministère (à savoir 2 700 agents) », souligne la Banque mondiale.

« J’ai un promotionnaire d’université à qui on a vendu un terrain dans une forêt classée dans la Sissili »

Bassirou Ouédraogo du syndicat est du même avis. Pour lui, le ratio de l’effectif est très faible : « Quand on se retrouve avec une superficie de 500 000 hectares à couvrir avec deux ou trois agents, à la limite, ils font ce qu’ils peuvent. Quand on prend les Parc W, Arly, Nazinga et autres, ce sont des grands espaces. J’ai fait partie d’une équipe de 15 personnes dans la forêt du Nazinga. Nous avons fait une semaine dans la forêt sans pouvoir atteindre tous les points. Les permanents là-bas ne dépassaient pas cinq personnes. » Mais ces dernières années, l’autorité politique semble avoir changé sa vision. Le gouvernement a, en effet, lancé en 2023, le recrutement de 4000 agents des Eaux et Forêts sur trois ans. « C’est le plus gros effectif de recrutement depuis l’histoire des agents des Eaux et Forêts. », reconnaît Bassirou Ouédraogo.

Le Secrétaire général du Syndicat national des Agents des Eaux et Forêts (SYNAFOR), Bassirou Ouédraogo

Mais pour le SG du SYNAFOR, les dirigeants ne sont pas les seuls responsables. Les populations et les collectivités locales jouent parfois un mauvais rôle, à travers la promotion immobilière. « J’ai un promotionnaire d’université à qui on a vendu un terrain dans une forêt classée dans la Sissili.  Quand il m’a appelé pour m’expliquer son problème, je lui ai dit que si c’est dans une forêt classée, il faut qu’il fasse tout pour récupérer son argent ou bien qu’il considère qu’il l’a perdu. Parce que ça ne peut pas passer. Et j’ai eu la confirmation avec un collègue qui s’occupe de cette forêt. Effectivement la parcelle se trouvait dans la forêt. Il a été trompé par une société immobilière.» Mais les vagues de chaleur qui ont causé de nombreux décès entre mars et mai 2024 vont-elles réveiller les consciences de tous les acteurs, décideurs comme populations, sur le danger commun que représente la perte des forêts ?

Par Lomoussa BAZOUN, Sira info, avec le soutien de la CENOZO dans le cadre du projet “programme Sahel”.

Encadré

Un secteur porteur
Selon la Banque mondiale, le secteur forestier contribue à environ 9,6% au produit intérieur brut (PIB) du Burkina Faso, grâce à la production du bois de chauffe, la vente des produits forestiers non ligneux bruts et transformés ainsi que la chasse, le tourisme et les autres secteurs liés à la biodiversité. Or la contribution de l’or au PIB en 2023 est estimée à 12,2%. Le secteur forestier est donc presque aussi porteur de développement que le secteur minier. Mais il est à la croisée des chemins. 

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