Cet écrit provient de l’enfant d’un ex-travailleurs de la Société de Recherche et d’Exploitation Minière du Burkina (SOREMIB) de Poura, fermée en 1999. Selon son auteur, depuis la fermeture, les ex-travailleurs dont plaide la cause n’ont pas bénéficié de réparation, de dédommagement. D’autres sont aujourd’hui décédés. Mais cette injustice perdure.
Ceci est un cri du cœur, au nom de ces hommes et ces femmes qui ont donné leur jeunesse, leur santé, parfois même leur vie, pour une mine, une nation qui les a abandonnés. Je lance un appel aux pouvoirs publics, à la conscience collective pour toutes ces victimes. Il y a 26 ans, en 1999, la Société de Recherche et d’Exploitation Minière du Burkina (SOREMIB), première mine industrielle du Burkina Faso, fermait ses portes à Poura, commune située dans la province des Balé, laissant derrière elle des centaines de travailleurs sans salaires, sans indemnités, sans couverture médicale, sans reconnaissance. Aujourd’hui, ces visages oubliés, ces voix étouffées et rongés par l’amertume, méritent d’être entendus et leurs souffrances soulagées.
Avant tout propos, je m’incline avec respect et émotion devant la mémoire de ces « soldats » tombés sur le champ d’honneur, ces héros qui ont sacrifié leur vie pour défendre des idéaux de liberté, de justice et de paix. Leur courage et leur abnégation resteront à jamais gravés dans nos cœurs, symboles éternels de dévouement et d’amour pour notre patrie. Je rends également hommage aux combattants (FDS et VDP) qui, aujourd’hui encore, continuent de se battre avec bravoure pour libérer notre pays du joug de l’oppression. Leur résistance et leur détermination incarnent l’espoir d’un avenir meilleur, où la dignité et la liberté triompheront. Que leur lutte ne soit pas vaine, et que leur sacrifice inspire les générations futures à œuvrer pour un Burkina plus juste et fraternel.
Imaginez un instant. Des années à travailler dans les profondeurs de la terre (mine souterraine), dans des conditions souvent inhumaines, pour extraire des richesses qui ont fait tourner l’économie du pays. Des familles entières qui ont cru en la promesse d’un avenir meilleur, en échange de leur labeur. Et puis, un jour, tout s’effondre. Absolument tout! La mine ferme. Les emplois disparaissent. Les promesses s’envolent. Et ces travailleurs, ces héros du quotidien, sont laissés à eux-mêmes, sans compensation, sans soutien, sans espoir, pire, avec des séquelles physiques et psychologiques profondes.
26 ans, oui 26 longues années d’attente, de souffrance et de silence. 26 ans pendant lesquels ces anciens mineurs ont vu leur santé se détériorer, leurs économies s’épuiser, leurs rêves s’éteindre, et leurs familles se déchirées. Beaucoup sont partis sans avoir vu la justice tant promise au moment de la fermeture de la mine. D’autres survivent encore, portant le poids de cette injustice comme une croix invisible mais très lourde. Leurs familles, leurs enfants, leurs petits-enfants, continuent de subir les conséquences de cette « trahison ».
Comment rester insensible face à une telle détresse ? Comment accepter que ceux qui ont tant donné soient traités comme des reliques, jetables et oubliables ? Ce n’est pas seulement une question d’argent. C’est une question de dignité, de respect, de reconnaissance. Ces hommes et ces femmes méritent plus que des excuses. Ils méritent une réparation, ils méritent justice.
Ce sont 283 employés compressés en août 1990 et 356 employés présents au moment de la fermeture en 1999. De la date de fermeture à aujourd’hui, toutes les démarches pour obtenir réparation sont infructueuses. La justice a pourtant reconnu la justesse de leur cause et demander une réparation.
Jusqu’à quand vont-ils attendre? Certains ont déjà passé l’arme à gauche. N’est-il pas temps et humain de mettre fin à cette injustice dont sont victimes ces 639 familles qui souffrent dans le silence depuis 1999. L’absence de dédommagement a plongé nombreuses d’entre elles dans un dénuement extrême. Les anciens mineurs, aujourd’hui âgés, vivent souvent dans des conditions précaires, sans accès à des soins de santé adéquats ou à une retraite digne. Cette situation ne peut et ne dois plus durer. L’inaction perpétue une injustice qui touche non seulement les anciens employés, mais aussi leurs familles et leurs communautés. Que pourrai-je dire de ceux qui sont décédés avec l’espoir enfermé dans le point de la main ? Puisse vos âmes trouver le repos éternel!
Orphelin d’un ex-mineur, mon souhait le vif, à travers ces lignes, est que justice soit faite. Que les arriérés de salaires soient payés. Que les indemnités et dues soient versées. Que des pensions dignes soient accordées à ceux qui ont tout perdu. Que des soins de santé soient fournis à ceux dont le corps porte encore les stigmates de leur dur labeur. Et surtout, que leur sacrifice et leur contribution à l’économie nationale soient enfin reconnus, officiellement, publiquement, pour que plus jamais une telle injustice ne se reproduise au pays des Hommes intègres.
En agissant maintenant, nous envoyons un message fort : celui que notre société ne laisse personne derrière elle, que nous honorons nos engagements et que nous valorisons ceux qui ont contribué au développement de notre cher pays le Burkina Faso. Ce geste ne sera pas seulement une réparation pour le passé, mais aussi un investissement pour l’avenir, en montrant que la justice et la solidarité sont au cœur de nos valeurs. Et cela est aussi de la responsabilité de l’Etat, qui se doit de protéger ses citoyens.
Ce n’est pas seulement une dette financière. C’est une dette morale. Une dette envers les ex-travailleurs de la SOREMIB et l’ensemble des travailleurs qui ont construit, pierre après pierre, le pays que nous connaissons aujourd’hui. Une dette envers leurs familles, qui ont souffert en silence pendant des décennies et qui souffrent encore aujourd’hui. Une dette envers notre humanité, qui ne peut se permettre d’oublier ceux qui ont tant donné.
Mesdames et Messieurs, lecteurs, citoyens, décideurs, je vous en supplie : ne détournez pas le regard. Ces visages, ces histoires, ces vies brisées, méritent votre attention, votre compassion, votre action. Il est temps de réparer l’irréparable. Il est temps de rendre justice à ceux qui ont été oubliés. Il est temps de leur rendre leur dignité, leur humanité volées.
Agissons maintenant, ensemble, pour que ces 26 années d’attente ne soient pas vaines.
Parce que chaque vie compte. Parce que chaque sacrifice mérite d’être honoré. Parce que la justice, aussi tardive soit-elle, doit enfin être rendue. Parce que le Burkina Faso nouveau ne saurait laisser l’injustice perdurer. Entendez-les! Entendez les cris de leurs enfants!
Constant SOMDA,
Orphelin d’un ex-mineur mort dans l’attente de son dû
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NB : Le chapeau est de la rédaction.