Centre de gestion agréé de Ouagadougou, acte 2 : Les petites affaires louches du directeur

Le directeur du Centre de gestion agréé de Ouagadougou (CGA), Boukary  Sawadogo, est sur sa 16e année dans cette fonction. Peu connu du grand public, le CGA semble pourtant assez stratégique pour la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina (CCI-BF). C’est une structure spécialisée, chargée d’accompagner les petites et moyennes entreprises. Créé en 2008, Boukary Sawadogo est le premier et le seul directeur jusqu’à ce jour. Mais sa gestion révèle de petites affaires louches et intrigantes.

Le CGA, c’est sa « maison ». Il bat peut-être le record de longévité. Il y est directeur depuis sa création en 2008. Mais quelques-uns de ses actes interrogent. Le directeur du CGA Boukary Sawadogo, par ailleurs ancien PCA du club Ouagalais EFO, utilise parfois les fonds de la structure pour certains voyages privés, avec la bénédiction du Président du Conseil d’administration. Juste un exemple à titre illustratif. En fin septembre 2023, un ordre de mission lui donne l’autorisation de se rendre au Nigeria (Port Harcourt). Motif de la mission : « Accompagnement de l’EFO Match retour 2e tour préliminaire Coupe CAF 2023-2024. Prise en charge : forfait Centre de gestion agréé de Ouagadougou (CGA)  ». Il a ainsi pris l’avion, selon cet ordre de mission, le 30 septembre pour revenir le 3 octobre 2023. Il a donc utilisé les fonds du CGA pour financer une activité du club dont il était le PCA. Et ce n’est pas tout !

Le nom du DG d’une entreprise privée se trouve sur un ordre de mission avec le directeur du CGA

Un autre cas intriguant! Avant la mission de l’EFO au Nigeria payée par le CGA, le directeur s’est rendu par exemple, à Ouahigouya en fin d’année 2019. Une mission du CGA. Motif du voyage : « Participation à l’Assemblée générale ordinaire de la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina Faso (CCI-BF). Prise en charge: Centre de gestion agréé de Ouagadougou (CGA)» La mission a lieu du 6 au 8 décembre 2019. Mais un fait intrigue. Le chauffeur dont le nom se trouve sur l’ordre de mission est Allou Egnouan. Au sein de la structure, personne ne semble connaitre ce « chauffeur » comme faisant partie du personnel. Mais alors, comment peut-il être le chauffeur d’une mission officielle du directeur du CGA ?

Nous avons retrouvé les coordonnées de ce fameux « chauffeur ». « Etes-vous bien le chauffeur du directeur du CGA Boukary Sawadogo ? », lui demande-on. Sa réponse est formelle : « Je ne suis pas le chauffeur du directeur. Je suis son ami. Moi je suis directeur général de l’entreprise SIPO. » Mais comment le DG d’une entreprise privée peut se transformer en chauffeur d’un responsable public ? « Comme je conduis, de temps à autre, je lui donne un coup de main », nous dit-il.  Les faits sont donc clairs : le directeur utilise un subterfuge pour « amener » son ami en mission officielle avec lui, au frais de la « maison ».

Allou Egnouan n’a effectivement pas menti sur son statut de DG d’une entreprise privée. Nous avons fait une petite recherche documentaire sur la société SIPO. Selon ses documents de création, elle existe depuis 2014. Sa dénomination complète sur ses documents légaux est SERIGRAPHIE IMPRIMERIE PLUME D’OR (SIPO). Les activités relevant de sa compétence sont la « Sérigraphie, la calligraphie et des prestations diverses ». C’est donc une entreprise spécialisée dans la calligraphie, la sérigraphie et les prestations connexes.

Mais tenez-vous bien ! Au CGA, cette entreprise obtient des marchés d’études de faisabilité de projets, de consultation, etc. qui relèvent de la compétence d’experts ou d’entreprises spécialisées du domaine.

Le CGA attribue « la réalisation de l’étude d’évaluation du programme Burkina Startups et la formulation d’un nouveau programme » à SERIGRAPHIE IMPRIMERIE PLUME D’OR

Premier cas d’exemple ! Nous avons obtenu copie d’une facture proforma « d’avenants et travaux d’actualisation des études » d’un marché dénommé « Projet de création d’une unité de conservation et de transformation de fruits et légumes de Ouahigouya », signée par le Directeur général de SIPO, Allou Egnouan. C’est un marché divisé en trois points. La première partie concerne des « travaux de l’étude de préfaisabilité. » Montant : 3 645 000 FCFA.  La deuxième partie concerne « l’étude de l’option commercialisation et prise en compte de la possibilité d’extension ». Son coût est évalué à 3 610 000 FCFA. Et enfin, « l’étude de l’option de transformation, actualisation des données de l’étude et appui à la levée de fonds » d’un coût évalué à 7 150 000 FCFA. Le montant total de la facture proforma de cet avenant et travaux d’actualisation est de 14 405 000 FCFA. Elle date du 6 août 2021. Une entreprise de sérigraphie et calligraphie peut-elle réellement faire ce travail au point d’établir une facture proforma ? Et ce n’est pas fini !

Lire aussi: Centre de gestion agréé de Ouagadougou/CCI-BF : Le personnel sans statut depuis 16 ans – sirainfo.com

En février 2022, cette entreprise de l’ami du directeur du CGA, spécialisée en sérigraphie et calligraphie, a encore obtenu un autre marché de consultation.  Le 18 février 2022, une facture portant la signature du DG de SIPO est établie pour réclamer le paiement d’honoraires pour la « mise à contribution d’un expert en financement des PME et d’un expert en accompagnement des PME pour la réalisation de l’étude d’évaluation du programme Burkina Startups et la formulation d’un nouveau programme ». Montant total : 5 millions FCFA. Une entreprise de calligraphie et sérigraphie peut-elle obtenir des marchés de ce type ? Ce marché a tous les germes d’un conflit d’intérêt lié à l’amitié avérée entre le directeur et le premier responsable de SIPO qui est même parfois son « chauffeur » dans des missions officielles.

Nous avons contacté le directeur Boukary Sawadogo depuis le 20 mai 2024, avec des questions claires sur la question, pour avoir sa version sur ces petites affaires louches. Il avait promis mettre à notre disposition, de retour d’un voyage, les éléments nécessaires. Jusqu’à ce jour, cette promesse n’est pas tenue. Mais il avait déjà reconnu certains faits, notamment le cas de la mission de l’EFO payée avec les frais du CGA. « Pour le cas EFO, c’est vrai », confirme-t-il. A suivre !

Par Lomoussa BAZOUN, Sira info

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