Le gouvernement, avec à sa tête le Premier ministre, Apollinaire Kyélem de Tambèla, a rencontré les acteurs du secteur privé ce lundi 12 février à Ouagadougou. Objectif : expliquer aux acteurs du monde économique, les enjeux liés au retrait du pays de la CEDEAO. Selon le ministre du Développement industriel, du commerce, de l’artisanat et des petites et moyennes entreprises, Serge Poda, le retrait du Burkina de la CEDEAO peut être bénéfique.
Dimanche 28 janvier. Le ministre d’Etat porte-parole du gouvernement se présente au journal de 13h de la RTB, l’air grave. Il annonce le retrait du Mali, du Niger et du Burkina (membres de l’Alliance des Etats du Sahel) de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Mais cette décision inquiète. Surtout le secteur privé. Ce lundi 12 février, le Premier ministre Apollinaire Kyélem de Tambèla et ses ministres, lancent une offensive. Objectif : rassurer ces acteurs.
Apollinaire Kyélem de Tambèla est convaincu que son gouvernement maitrise les enjeux. « Je rappelle que depuis le 9 mars 1960, avant donc la création de la CEDEAO, il existe entre le Burkina et la Côte d’Ivoire, une convention relative aux conditions d’engagement et d’emploi des travailleurs burkinabè en Côte d’Ivoire. De même existe-t-il des conventions bilatérales avec d’autres pays dans plusieurs domaines. Le retrait de la CEDEAO va donc nous permettre de nous réorganiser en fonction de nos intérêts et de signer des accords bilatéraux avec ceux que nous voulons, dans divers domaines en fonction des intérêts réciproques. Et ce, de manière indépendante, et sans l’immixtion de quelle que puissance que ce soit. Rien n’empêche donc, de renouveler ou d’adapter en cas de besoin, nos relations avec chaque Etat membre de ce qui reste de la CEDEAO. Mais plus jamais, personne ne pourra encore instrumentaliser une institution, nous imposer ou nous faire subir quoi que ce soit. Notre retrait de la CEDEAO n’est orienté contre personne, contre aucune institution, contre aucun Etat. », martèle-t-il.
Reconnaissant cependant que « cette décision pourrait soulever des inquiétudes et des questions légitimes au sein du secteur privé », le ministre en charge du commerce Serge Poda a laissé entendre que le gouvernement est « conscient des défis auxquels pourrait faire face ce secteur ». Sur un ton rassurant, il affirme que tout sera mis en œuvre cependant pour préserver les intérêts du Burkina.
« Ce retrait nous offre d’immenses possibilités de mener des négociations et de signer des accords commerciaux avec des partenaires de choix », ministre en charge du commerce Serge Poda
Le retrait offrirait un boulevard d’opportunités pour les affaires, selon le ministre en charge du commerce. « Ce retrait nous offre d’immenses possibilités de mener des négociations et de signer des accords commerciaux avec des partenaires de choix. (…) le pays aura ainsi l’avantage de renégocier des accords multinationaux et bilatéraux en phase avec les aspirations profondes du peuple burkinabè en termes de souveraineté chèrement reconquise », explique-t-il face à un public intéressé.
A l’en croire, le retrait du Burkina de la CEDEAO crée une autre opportunité pour l’assiette fiscale. Les produits venants des pays membres de la CEDEAO seront touchés par les taxes à l’importation du fait de l’absence d’accords spécifiques désormais entre le Burkina et l’organisation. Autre avantage, selon le ministre Serge Poda : la création de commerces intégrés par la dynamisation les échanges intra-communautaires. « Ces échanges seront amplifiés par le fait que ces pays sont des partenaires naturels. Enfin, il est à relever que le Burkina Faso bénéficie toujours d’une position géographique centrale unique au cœur de l’Afrique de l’Ouest, en offrant plusieurs avantages stratégiques sur le plan commercial. Aussi, en tant que pays membre de l’UEMOA, il continue de bénéficier des avantages d’accès au marché commun de cet espace », dit-il face au monde du secteur privé.
« Associer intimément le secteur privé national dans la reconfiguration de notre cadre de coopération avec les pays membres de l’AES », Président de la Chambre de commerce, Mahamadi Savadogo
Le président de la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina, Mahamadi Savadogo, est formel. La structure qu’il représente est en phase avec la décision du gouvernement : « Le soutien du secteur privé est acquis, son engagement à vos côtés est sans équivoque ». Mais il égraine tout de même des doléances dot la prise en compte pourrait soulager les acteurs : « Il s’agit de mettre en place une stratégie nationale de promotion des investissements privés nationaux dans des secteurs stratégiques ; associer intimément le secteur privé national dans la reconfiguration de notre cadre de coopération avec les pays membres de l’AES. Nous proposons également que les branches d’activités économiques qui pourraient enregistrer des effets indésirables de cette décision bénéficient d’un plan de résilience et de redéfinition de leur modèle économique. Nous n’oublions pas aussi les petits commerçants transfrontaliers et surtout les femmes qui tirent l’essentiel de leurs revenus de commerces avec les pays voisins ».
Par Marie D. Somda, Sira info