Le 24 mai 2021, le gouvernement du pouvoir de Roch Marc Christian Kaboré a décidé de la fermeture du plus grand lycée public du Burkin. Une nécessité de réhabilitation des bâtiments construits depuis l’époque coloniale avait été ensuite avancée pour justifier cette décision. Depuis lors, les ministres se suivent au ministère en charge de l’éducation nationale et tiennent le même discours d’espoir de réouverture. Mais dans les faits, rien de concret sur le terrain. De Stanislas Ouaro à Jacques Sosthène Dingara en passant par Lionel Bilgo et Joseph André Ouédraogo, aucun d’eux n’a pu changer le visage hideux que présente aujourd’hui ce grand lycée d’où sont sortis de nombreux cadres du pays. Le ministre avait affirmé devant les députés que ce Lycée ouvrirait enfin ses portes à la rentrée scolaire 2024-2025. Mais le constat sur les lieux ne donne pas d’espoir.
« Le processus de réhabilitation des établissements emblématiques a démarré avec le Lycée Philippe Zinda Kaboré où des études architecturales et techniques ont été menées et une inscription budgétaire de 4 000 000 000 F CFA faite au titre de l’année 2023 pour le démarrage des travaux », publiait l’Agence d’information du Burkina (AIB) le 3 mai 2023 en précisant qu’il s’agit d’un extrait du rapport du Conseil des ministres. Plus de précisions seront données par le ministre de l’Education nationale, de l’alphabétisation et de la promotion des langues nationales (MENAPLN), Joseph André Ouédraogo, le vendredi 2 juin 2023 en réponse à une question orale de la députée Angèle Tiendrébéogo/Kalenzaga : « Au regard de la fin des travaux de la première phase prévue en décembre 2023 et du démarrage des travaux de la deuxième phase en janvier 2024, la réouverture du lycée pourrait intervenir à la rentrée scolaire 2024-2025 ».
« Nous pouvons avec fierté considérer que le Lycée Zinda va rouvrir ses portes à la rentrée prochaine avec la mission de devenir un lycée scientifique d’excellence pour notre pays », ancien ministre Ousséni Tamboura, novembre 2021
Mais avant lui, d’autres ministres avaient également fait pratiquement les mêmes déclarations enjolivées. « Nous pouvons avec fierté considérer que le Lycée Zinda va rouvrir ses portes à la rentrée prochaine avec la mission de devenir un lycée scientifique d’excellence pour notre pays », ainsi parlait l’ancien porte-parole du gouvernement, Ousséni Tamboura, au sortir du Conseil des ministres du 25 novembre 2021. L’ancien ministre de l’Education nationale, Stanislas Ouaro avait déjà affirmé sur le plateau de la télévision 3TV ceci : « Nous souhaitons que les études architecturales du lycée soient achevées d’ici décembre pour qu’en octobre 2022, nous puissions ouvrir un lycée complètement réhabilité ». Du 24 mai 2021 à aujourd’hui, pratiquement trois ans. Et les choses ne s’annoncent pas bonnes pour la rentrée scolaire 2024-2025 qui commence en octobre 2024.
Mardi 27 février 2024, dans la cour du «Noble Zinda», il ne reste plus rien de noble. Les bâtiments paient le prix de leur âge. Dès l’entrée, un vigile se donne la peine de rabattre le portail en souffrance. En face, le buste de Philippe Zinda Kaboré, érigé dans la cour de l’établissement semble regretter le choix porté sur sa personne. Ayant perdu tous ses enfants depuis la fin de l’année scolaire 2020-2021, suite à des manifestations, le noble Zinda n’est plus que l’ombre de lui-même. Des feuilles d’arbres, des papiers et des sachets se disputent les coins de la cour. Du feu a brûlé les herbes et feuilles d’une partie du côté nord-ouest. La cour est vétuste. Les arbres semblent avoir profité de l’absence des élèves pour grandir sous les ordures qui menacent l’écosystème. Mais quelques élèves et étudiants profitent de l’ombre de ces arbres pour étudier. Des élèves policiers et douaniers y feuillettent leurs cahiers pour préparer leurs évaluations.
Le constat est donc clair : aucun travail n’a démarré ou n’est en phase de démarrage sur le site du lycée Philippe Zinda Kaboré.
Certaines salles ont été prêtées au lycée voisin. En effet, des élèves portant la tenue du Lycée professionnel régional du Centre (LPRC) étaient dans la cour du Zinda. « Nous sommes des élèves du LPRC, mais nous prenons cours ici. Quelques salles nous ont été prêtées.», nous a confié l’un d’eux.
Mais pas de tas de sable ou de graviers perceptible sur les lieux. Le constat est donc clair : aucun travail n’a démarré ou n’est en phase de démarrage sur le site du lycée Philippe Zinda Kaboré.
Le calendrier de début des travaux donné par le ministre à l’Assemblée législative de transition est déjà faussé. Pourtant, selon lui-même le 2 juin 2023, les fonds pour la réhabilitation sont là. Ils étaient inscrits dans le budget de 2023 du ministère.
Sira info a voulu avoir l’état d’avancement du dossier au ministère en charge de l’éducation nationale. La direction de la communication nous a renvoyé au Secrétariat général. Le 19 mars 2024, une demande d’entretien a été adressée au Secrétaire général du ministère. Mais elle est restée lettre morte. La relance de la direction de la communication n’y a rien fait. Le Lycée Phillipe Zinda Kaboré ouvrira-t-il comme l’avait annoncé le ministre devant la représentation nationale le 2 juin 2023 et relayé par les médias ? Qu’est-ce qui bloque ?
Ces questions restent posées. L’actuel ministre Jacques Sosthène Dingara, qui a officiellement pris fonction le 19 décembre, ne s’est pas encore prononcé publiquement sur la question. Il n’en reste pas moins que les dates pour le démarrage des travaux n’ont pas été respectées.
Par Judichaël KAMBIRÉ, Sira Info