Le Centre pour la gouvernance démocratique (CGD) a organisé une journée de débat, en prélude à la tenue des Assises nationales, le 23 mai 2024. L’enseignant-chercheur en droit à l’université Nazi Boni, Pr Martial Zongo, faisait partie des animateurs. Il s’est notamment prononcé sur les implications juridiques et politiques du retrait du Burkina de la CEDEAO. Selon lui, se retirer de cette organisation ne met pas systématiquement fin à l’accord sur la tenue d’élections libres et transparentes.
Les élections ne sont pas si mauvaises que le pensent certains. C’est l’avis du Pr Martial Zongo pour qui « le retrait du Burkina Faso de la CEDEAO ne rend pas automatiquement caduque l’accord sur le retour à l’ordre constitutionnel normal car l’article 91 de la charte de la CEDEAO stipule que c’est après un an que le départ est effectif ». La CEDEAO peut rappeler aux autorités l’accord signé, dit-il. « La rationalité du retrait avec effet immédiat suppose une urgence qui dans ce cas reste introuvable », souligne l’enseignant de droit. Il rappelle que le Burkina Faso a également ratifié le Protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance qui pourrait aussi intervenir dans le cadre de la tenue des élections dans les délais prévus par l’accord. L’UEMOA et l’Union Africaine, autres institutions dont est membre le pays, peuvent intervenir dans ce sens. « Nous sommes sortis de la CEDEAO mais nous restons dans l’UEMOA qui impose également les mêmes règles de bonne gouvernance et de démocratie », a précisé Pr Martial Zongo.
Mais le dernier rempart, selon lui, c’est le peuple. Les populations burkinabè constituent la force qui décide de son sort en dernier ressort. En quittant la CEDEAO, les autorités de la transition n’ont donc pas enterré de facto l’accord sur la tenue des élections. Et puis, « la démocratie n’est pas qu’électorale. La démocratie renvoie également aux questions de la contradiction, à l’indépendance des pouvoirs, à la diversité des opinions », a laissé entendre l’enseignant chercheur. Le contexte sécuritaire qu’évoquent certains comme condition sine-qua-non ne pèse pas assez dans la balance selon lui. « La Russie, (malgré sa guerre contre l’Ukraine) a organisé ses élections, qu’elles soient bonnes ou mauvaises. Le Mali pour le référendum, le Tchad, le Sénégal ont tenu leurs élections dans des contextes de troubles ». Les élections peuvent donc s’organiser au Burkina comme d’ailleurs en 2020. Pr Martial Zongo a conclu son propos en disant que les premiers bénéficiaires de l’Etat de droit et de l’ordre constitutionnel sont les Burkinabè. Ce n’est ni la CEDEAO ni l’Union Africaine.
Par Judichaël KAMBIRE, Sira info