La ministre de la Solidarité, de l’action humanitaire, de la réconciliation nationale, du genre et de la famille, Nandy Somé/Diallo, a fait face aux députés, ce vendredi 26 janvier à l’Assemblée législative de Transition (ALT). Au menu : situation des victimes de l’application du Programme d’Ajustement Structurel (PAS). Elle a été invitée par la représentation nationale à donner des explications sur la situation de ces victimes. A l’en croire, des tentatives d’indemnisation ont déjà eu lieu, dont la plupart se sont soldées par des désaccords entre les parties.
Les Programmes d’ajustement structurel (PAS), venus tout droit des institutions de Bretton Woods ont mis de milliers de salariés au chômage dans les années 1990. Les PAS ont obligé les Etats qui s’y sont engagés à se désengager de certains secteurs de l’économie et à les privatiser. Au Burkina, quarante-trois (43) sociétés d’État ont en ont été victimes. Conséquences : des licenciements de 7245 travailleurs, selon le rapport général (2016-2021) du Haut Conseil pour la Réconciliation et l’Unité Nationale (HCRUN). Le rouleau compresseur des PAS les a éjectés du système sans droits. Des décennies après, le système ne leur a toujours pas rendu justice. Qu’est-ce qui bloque ?
Selon la ministre de la Solidarité, de l’action humanitaire, de la réconciliation nationale, du genre et de la famille, Nandy Somé/Diallo, des tentatives de paiement des droits ont eu lieu ces dernières années. «Lors des discussions entre le HCRUN et les travailleurs déflatés, il avait été proposé d’accorder une indemnité spéciale de douze (12) mois de salaire à titre de compensation et un forfait de neuf cent mille (900 000) francs CFA pour chacun des travailleurs déflatés mais cette proposition n’avait pas rencontré l’assentiment de ces derniers. En effet, ils estimaient que la proposition du Gouvernement n’était pas équitable car certains d’entre eux avaient déjà perçu une indemnité de plus de douze (12) mois de salaire », a expliqué la ministre Nandy Somé face aux députés. La proposition du gouvernement n’est donc pas à la hauteur des attentes.
Nouveaux épisodes soldés d’échecs
10 octobre 2023. Un comité interministériel rencontre les représentants de l’Association nationale des travailleurs déflatés (ANTD). Objectif : échanger avec eux sur les modalités d’indemnisation des préjudices subis. Là, les représentants de l’ANTD, selon la ministre, proposent des simulations de liquidation des indemnités spéciales sur la base de soixante (60) mois de salaire. « Ces soixante (60) mois de salaire sont les résultats d’un protocole d’accord signé entre l’Etat et les syndicats au moment des privatisations des sociétés et entreprises », disent-ils. A en croire la ministre, des recherches aux ministères en charge de la fonction publique et du commerce n’ont pas permis de retrouver ce protocole d’accord.
10 novembre 2023 : le ministre d’Etat, en charge de ma fonction publique Bassolma Bazié, entre dans la « danse ». Il a initié une rencontre avec le comité interministériel et les représentants des victimes et a proposé d’adjoindre « des personnes ressources de son ministère pour faciliter le traitement du dossier ».
28 novembre 2023 : le comité interministériel et une personne ressource du ministère en charge de la fonction publique ont examiné la proposition faite par l’ANTD, révèle Nandy Somé. Conclusion : « il ressort que cette proposition serait difficilement soutenable par le budget de l’Etat au regard des priorités du moment. »
Le 14 décembre, les victimes font une nouvelle proposition
Le 6 décembre 2023, explique la première responsable de l’action humanitaire devant les députés, le comité interministériel s’est de nouveau réuni sur la question. « De cette rencontre, le comité interministériel a proposé le paiement des droits légaux et la liquidation des indemnités spéciales à titre de compensation de vingt-quatre (24) mois. », dit-elle. Cette proposition a été portée aux victimes le 12 décembre. « Les représentants des corporations présentes à cette rencontre n’étaient pas favorables à cette proposition qu’ils trouvaient inéquitable et non inclusive », soutient la ministre. Mais les victimes reviennent le 14 décembre 2023 avec une nouvelle proposition : « les membres de l’ANTD ont consenti des abattements de l’ordre de 25 à 90% sur leurs indemnités spéciales restantes. »
Le sujet a donc connu plusieurs rebondissements. Pour la ministre chargée de la solidarité, leur indemnisation fait partie des préoccupations du gouvernement. « Le processus est donc en cours, un dialogue et des concertations permanentes sont maintenus entre les travailleurs déflatés et le Gouvernement. Dès que le contexte national le permettra, le Gouvernement prendra certainement les mesures nécessaires pour l’effectivité du règlement de ces indemnités », conclut-elle.
Les députés exhortent le gouvernement à rendre justice aux victimes
Le député Adama Yasser Ouédraogo, qui remis le sujet au goût du jour, et certains de ses collègues ont exprimé au gouvernement leur désolation face à cette situation qui ne fait que perdurer. La situation des personnes déflatées est bien antérieure à la crise sécuritaire. Les députés ont donc invité le gouvernement à prendre à bras-le-corps leur situation afin que ceux qui sont encore en vie puissent bénéficier de leurs droits avant de passer l’arme à gauche.
par Judicaël KAMBIRE
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