Burkina : Des dettes et créances à problèmes de 171,6 milliards FCFA

L’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et Lutte contre la corruption (ASCE-LC) a été mandatée par le ministre en charge des finances pour procéder à l’audit des arriérés et dette flottante de l’Etat au 31 décembre 2023. L’audit a eu lieu entre février et mai 2024 et a concerné 34 ministères et institutions et 21 sociétés d’Etat. Mais le rapport final date d’octobre 2024 et révèle qu’une partie de la dette est problématique.

L’audit a été réalisé dans le cadre du programme économique 2023-2024 du Burkina, soutenu par la Facilité élargie de crédit (FEC) et Fonds monétaire international (FMI). Son objectif principal : dresser un inventaire certifié des arriérés et de la dette flottante au 31 décembre 2023, ainsi que de leurs compositions précises afin de pouvoir proposer une stratégie de remboursement. Les conclusions de l’audit font le point de la dette et des créances régulières et celles irrégulières.

Selon le rapport, trente-quatre (34) ministères et institutions, vingt et un (21) sociétés d’Etat, de Prévoyance Sociale et assimilées et les deux communes à statuts particuliers (Ouagadougou et Bobo Dioulasso) ont été audités.

« Le montant global de la situation produite par les différentes structures dans le cadre de cet audit est de 410 258 890 815 FCFA », révèle le document. Ainsi, au compte des ministères et institutions, la situation globale est de 133 353 583 005 FCFA et pour les communes à statut particulier (Ouaga et Bobo), le compteur affiche 20 232 832 039 FCFA. Quant aux Sociétés d’Etat, de Prévoyance Sociale et assimilées, le montant est de 256 672 475 771 FCFA.

« L’analyse de l’ensemble de ces dossiers a permis de les classer en « dette constituée » ou « créance constituée » et en « dette non constituée » ou créance non constituée » au 31 décembre 2023.

238,6 milliards FCFA de dette et créances régulières

D’abord la dette constituée. La dette est constituée, selon le rapport, lorsqu’il y a un document administratif qui prouve que l’administration a été effectivement bénéficiaire du service qui a engendré la dette : une preuve du service fait. Et sur ce point, l’ASCE-LC a découvert que la dette constituée de l’administration centrale et les créances constituées des sociétés d’Etat, de Prévoyance Sociale et assimilées sur l’Etat au 31 décembre 2023 se chiffrent à 218 911 741 646 FCFA dont 43 359 904 600 FCFA d’arriérés de paiement (dépense pour laquelle le délai de paiement est dépassée) des ministères et institutions  et une dette flottante (dépense pour laquelle la facture a été acceptée pour paiement et dont le délai de paiement fixé n’est pas encore échu, exceptées les avances de démarrage) des ministères et institutions de 57 973 649 772 FCFA.

Quant aux créances échues des sociétés d’Etat, de Prévoyance Sociale et assimilées sur l’Etat, elles sont évaluées à 61 178 858 603 FCFA et les arriérés de remboursement de la dette avalisées des mêmes structures par l’Etat sont estimées à 56 399 328 671 FCFA.

Pour les communes à statut particulier, la dette constituée au 31 décembre 2023 est de 19 691 222 980 FCFA dont 4 269 124 856 FCFA d’arriérés et 15 422 098 124 FCFA de dette flottante.

« Au total, la dette constituée de l’Etat et des communes à statut particulier et les créances constituées des sociétés d’Etat sur l’Etat au 31 décembre 2023 s’élève à 238 602 964 626 FCFA représentant 58,16% du montant des dossiers reçus. », indique le rapport. En termes clairs, c’est cette dette qui est régulière et l’Etat devrait la rembourser sans problème. Le reste de la dette pose problème. Elle n’est pas régulière et l’ASCE-LC a fait le point.  

Motifs d’irrégularités : absence de contrats, pièces justificatives irrégulières, etc.

Morceau choisit : « il ressort des travaux l’existence d’arriérés de paiement et de dette flottante irréguliers tant au niveau de l’Etat qu’au niveau des communes à statut particulier. » L’ASCE-LC a classé ces cas dans la catégorie de la « dette non constituée » de l’Etat. Au 31 décembre 2023, celle de l’administration centrale et des communes à statut particulier se chiffre à 32 561 637 692 FCFA dont 32 020 028 633 FCFA pour les ministères et institutions et 541 609 059 FCFA pour communes à statut particulier.  « Elle se compose essentiellement de dossiers fournisseurs dont les preuves de servir fait n’ont pu être apportés. », précise le rapport. Ce qui veut dire que les services concernés n’ont pas pu prouver l’effectivité des marchés qui ont engendré cette dette.

Quant aux créances non constituées des sociétés d’Etat et assimilées sur l’Etat, elles s’élèvent à 139 094 288 497 FCFA. « Ces créances non constituées se composent essentiellement de subventions non versées d’un montant de 135 058 229 212 FCFA et de prestations effectuées sans contrats préalables. », indique l’ASCE-LC.

Ainsi, la dette non constituée et les créances non constituées au 31 décembre 2023 s’élèvent à 171 655 926 189 FCFA soit 41,84% du montant des dossiers reçus.

Les raisons de ces irrégularités (dette et créances à problèmes) « sont essentiellement l’absence de contrat, l’absence du visa du DCMEF (Directeur de contrôle des marchés publics et des engagements financiers) sur certains contrats et de l’existence de pièces justificatives irrégulières dans certains dossiers au niveau de l’administration centrale. » Pour les deux communes à statut particulier, les irrégularités sont constituées essentiellement « d’absence de pièces justificatives de certains dossiers d’arriérés. »

Facteurs d’accumulation de la dette

Selon l’ASCE-LC, l’analyse des motifs de non-paiement a permis de relever que les principaux facteurs d’accumulation de la dette sont « l’absence de rigueur dans le suivi des dossiers non aboutis des exercices antérieurs ; l’exécution de dépenses sans l’établissement de contrat (influence du politique) ; la tension de trésorerie au niveau du Trésor public (faible mobilisation des ressources) ; le non-respect par l’Etat des modalités de remboursement contenues dans les conventions signées avec les sociétés d’Etat et assimilées ; la non mise en jeu de la responsabilité des acteurs pour faute de gestion ; l’instabilité institutionnelle. »

Par Lomoussa BAZOUN, Sira info

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