Le procès du dossier de l’effondrement de la dalle d’un bâtiment en construction à l’université Norbert Zongo a connu son épilogue ce mercredi 10 janvier 2024. Le drame avait causé la mort de 4 personnes. Des peines d’amende, des dommages et intérêts ont été prononcés en faveur des ayants-droits des victimes. Des employés des entreprises ont aussi été condamnés à des peines d’emprisonnement assorties de sursis. Lancé par le ministère en charge de l’enseignement supérieur, ce marché avait comme bailleur de fonds, la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA).
Plus de deux ans après, la justice a enfin tranché. Le verdict de l’affaire effondrement d’une dalle d’un bâtiment en pleine construction à l’Université Norbert Zongo à Koudougou est tombé aujourd’hui. 4 personnes avaient trouvé la mort dans ce sinistre le 31 août 2021. Le marché était exécuté par l’entreprise de droit burkinabè, Suzy construction, et l’entreprise saoudienne Bin Sammar. La société Sata Afrique (déjà exclue de la commande publique par l’ARCOP à cause de ce sinistre en mars 2022) et le Bureau Veritas sont les cabinets qui avaient en charge le contrôle du chantier. Le procès de l’affaire a commencé le 12 décembre 2023 au Tribunal de grande instance de Koudougou. Au verdict, les entreprises exécutantes sont reconnues coupables.
Les entreprises reconnues coupables “d’homicide involontaire “
Selon l’Agence d’information du Burkina, le groupement d’entreprise Suzy construction/Bin Sammar CO, la société Sata Afrique et la société Bureau Veritas sont reconnus coupables des faits « d’homicide involontaire et de blessures involontaires ». Suzy construction et Sata Afrique sont condamnés à payer une amende ferme de 2 000 000 F CFA chacun et la société Bureau Veritas à 1 500 000 F CFA ferme. Les quatre entreprises, selon l’AIB, sont condamnées « solidairement à payer, à titre de dommages et intérêts, 5 000 000 F CFA à Stéphane Abdoul Bassirou Nonkané sorti des décombres avec des blessures. »
31 millions FCFA de pour les ayants-droits des 4 victimes
Les ayants-droits des quatre personnes qui ont y perdu la vie recevront 10 000 000 F CFA (au nom de la victime Agbo Ivon ressortissant du Benin). « S’agissant des trois autres victimes, feus Serge Alexandre Kaboré, Baba Ibrahim Compaoré et Mouniratou Nana, leurs ayants-droits recevront respectivement, 6 000 000 F, 7 000 000 F et 8 000 000 F CFA. », indique l’AIB verdict. Des agents responsables des travaux, employés par les différentes entreprises sur le chantier au moment des faits, ont écopé de peines de prison assorties de sursis.
En rappel, le groupement d’entreprises attributaires de ce marché (Suzy construction et Bin Sammar) avait consenti un rabais de 985 280 100 FCFA sur leur offre financière qui était de 9,4 milliards afin d’avoir l’offre financière la plus « petite ». Des acteurs avisés avaient dénoncé ce rabais de 13,5% à l’Autorité de régulation de la commande publique (ARCOP) au moment de la passation du marché à travers une procédure exceptionnelle, disant que cela dénotait de « l’insincérité de leur offre ». Mais rien n’y fit. Le groupement avait remporté le marché.
Après le drame, l’ARCOP s’était enfin saisi du dossier et a fait une investigation. Elle a découvert que le taux d’exécution du marché était de 25,19% à la date du 5 août 2021 (le drame a eu lieu le 31 août). Mais les entreprises qui exécutaient le marché avaient quasiment été payées en intégralité. SATA Afrique avait été payée en intégralité pour ce qui concerne l’actualisation des études architecturales et techniques pour un montant de «125 500 000 FCFA HT-HD ». Pour la partie contrôle, le cabinet avait déjà reçu 80,88% soit 266 520 000 FCFA HT-HD. Les clauses contractuelles prévoyaient qu’il pouvait recevoir 80% jusqu’à la fin des travaux et avant la réception provisoire. Il avait dépassé ce montant à hauteur de 0,88 %. Un trop perçu.
Un marché de 9,4 milliards FCFA
Le groupement d’entreprises qui exécutaient le marché avait reçu 35,18% du montant du marché. Soit 3 318 087 100 FCFA TTC. Le montant total du marché est de 9,4 milliards. L’investigation de l’ARCOP avait révélé un fait. L’entreprise BIN SAMMAR était en groupement avec une entreprise de droit burkinabè. Mais voyez ce que dit le rapport de l’ARCOP : « Le personnel de l’entreprise Bin SAMMAR prévu dans le contrat n’a pas participé à l’exécution des travaux. A la réunion de démarrage du 31 janvier 2020 était présent un personnel non prévu dans le contrat. Cette situation pose la problématique des groupements fictifs avec la complicité d’entreprises étrangères ». Le projet visiblement était mal ficelé dès le départ.
par Marie D. SOMDA
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